En pèlerin de la paix et de la réconciliation

Deux jours après l’arrivée de Benoît XVI à Amman, les chrétiens de Jordanie - une communauté de 200 000 fidèles – pourront enfin voir celui qui est venu en « pèlerinage de paix » sur la terre de Moïse. Ils devraient être 25 000, ce matin, à assister à la première messe présidée en public par Benoît XVI, au stade d’Amman, avant la prière du Regina Coeli.

Jusqu’à présent, en effet, les fidèles jordaniens n’ont pu apercevoir le pape que derrière leur écran de télévision, la plupart des lieux visités par Benoît XVI n’étant pas adaptés pour accueillir le public : il en va ainsi du centre pour handicapés Regina Pacis, à Amman, de la basilique du Mémorial de Moïse, sur le mont Nébo, non loin du Jourdain, ou encore du site de la future université du Patriarcat latin, à Madaba.

Avant la messe de ce dimanche, le week-end aura surtout été marqué par la visite du pape dans la mosquée édifiée en 2006 en l’honneur du roi Husayn, père de l’actuel souverain Abdallah, sur les hauteurs d’Amman. Pour la deuxième fois depuis le début de son pontificat, Benoît XVI est ainsi entré dans un lieu de culte musulman - sans avoir ôté ses chaussures mais sur un épais tapis – après la Mosquée bleue d’Istanbul, en 2006.

Si, à l’époque, cette visite avait surtout été perçue comme un geste de réconciliation avec la communauté musulmane après la crise de Ratisbonne, le pape a profité de la rencontre d’hier pour dénoncer les « manipulations idéologiques » de la religion à des fins politiques, quelques mois après la reprise des hostilités entre les Territoires palestiniens et Israël, où il doit se rendre dès demain.

Ratisbonne loin derrière

Signe de la détente des relations entre chrétiens et musulmans, Benoît XVI était accompagné tout au long de la visite de cette mosquée, la plus importante de tout le royaume hachémite, par le prince Ghazi bin Talal, cousin et conseiller spécial du roi de Jordanie, et acteur majeur du dialogue entre chrétiens et musulmans. C’est lui qui est notamment à l’origine de la fameuse lettre « Une parole commune » adressée à l’Église catholique, première initiative de réconciliation côté musulman après Ratisbonne.

Le dialogue interreligieux, le respect de la liberté de religion et la paix au Moyen-Orient ont été au coeur de ces trois premiers jours passés en Jordanie. Alors qu’il se trouvait encore dans l’avion le conduisant à Amman, le pape a immédiatement posé les grandes lignes de son voyage apostolique en Terre sainte, en encourageant « le dialogue trilatéral » entre les religions monothéistes.

Entre le judaïsme et le christianisme, d’abord. Sur le mont Nébo, première étape de son pèlerinage dans les Lieux saints, d’où Moïse aurait vu la Terre promise, Benoît XVI a rappelé « le lien inséparable qui unit l’Église et le peuple juif » et a incité les fidèles à « dépasser tous les obstacles à la réconciliation des chrétiens et des juifs ».

Pour construire la paix entre juifs et musulmans, le pape parie sur la jeunesse. À Madaba, lors de la bénédiction de la première pierre de l’université du Patriarcat latin de Jérusalem, le pape a souhaité que ce lieu puisse former les étudiants jordaniens et des pays voisins « à la compréhension, à la tolérance et à la paix » face aux « idéologies anciennes ou nouvelles ».

« Sa force spirituelle »

Quant aux rapports entre chrétiens et musulmans, on peut considérer les visites dans les mosquées – hier à Amman puis, dans deux jours, à Jérusalem – comme un signe d’ouverture des plus éloquents.

Enfin, concernant sa contribution personnelle à la paix au Moyen-Orient, un sujet sur lequel il est très attendu – tant par les fidèles des trois religions du Livre que par les médias -, le pape a souligné venir en Terre sainte au nom de l’Église, convaincu que « sa force spirituelle peut contribuer aux progrès des processus de paix ». Une lourde charge pour les chrétiens d’Orient, de moins en moins nombreux.

SOURCE